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Juridictions de la Chefferie Batcha et de son Roi


De sa première dynastie, aux heures de la colonisation, et ensuite depuis l’instauration du gouvernement de la république du Cameroun, les juridictions de l’institution chefferial Batcha ont subi des mutations au cours de ces 3 grandes périodes qui constituent l’histoire socio-politique de ce groupement.

Les chefferies du Cameroun appartiennent à des contextes de gouvernance historiques bien distincts. Par exemple, les sociétés lignagères du Centre, du Sud et de l’Est où le chef d’origine coloniale, fait surtout figure de grand patriarche, plus respecté que craint, un primus inter pares. Traditionnellement ici, les populations ignorent la notion de chef; il y existe plutôt des leaders avec des pouvoirs d’arbitrage et non de commandement, l’autorité étant le résultat des performances personnelles.

Les lamidats du Grand Nord où les chefs peuls, les lamibé, demeurent des potentats « féodaux ». Enfin, les chefferies des Grass Fields (région de l’Ouest et du Nord-Ouest) dont la ténacité tient à ce qu’elles ont une légitimité rituelle profonde et procèdent d’une longue tradition.

Batcha qui se situe dans la région de l’Ouest, occupe un territoire qui fait partie des chefferies traditionnelles du Cameroun. De manière générale, les chefferies traditionnelles de l’Ouest sont à l’origine des micro-états. Aucune étude n’a été citée qui définit précisément la date de la première dynastie de ce petit royaume des pays Bamilékés, mais selon notre analyse, l’origine de la chefferie Batcha remonterait au 14e siècle (vers 1352).

Notre étude se base simplement sur le nombre des rois qui se sont succédé à Batcha. Il prend le chiffre très conservateur de 60 ans comme la moyenne de vie de ses Rois. Sachant donc que 11 Rois se sont succédés à Batcha en commençant par Sa Majesté Fouo Tchana, et en finissant par son souverain actuel S.M. Joseph Kouekam (né en 1944), si nous multiplions 11 Rois par leur moyenne de vie de 60 ans , nous arrivons à environ 660 ans d’existence du Royaume Batcha. Cela remettrait donc la première dynastie, celle de S.M. Tchana vers 1352.

Organisation Précoloniale
Avant l’arrivée des colons français, les chefs et les notables sont les seuls maitres du village. Le chef Batcha est un monarque. En effet, en cas de vacance de pouvoir, il est choisi au sein de la famille royale appelée à exercer coutumièrement la succession. Le chef a la mission de la conservation et le développement des richesses culturelles authentiques dont par ailleurs on se plait à dire qu’il est le gardien. Il a des pouvoirs religieux qui sont réputés assurer le contact entre les vivants et les morts, qui maintient à travers le chef une sorte de continuité avec l’au-delà. Ces pouvoirs religieux donnent au chef des pouvoir d’une dimension mystique, voire mythique qui ajoutent à la sacralité de l’institution. L’existence du palais royal vient couronner le pouvoir de l’institution chefferial.

Organisation Coloniale
La colonisation viendra transformer l’autorité du chef en autorité qu’il définit comme « indigène » pour ne pas créer le moindre doute que seule l’autorité colonial française l’emporte sur ses territoires. Dans ce contexte, le miro-état traditionnel Batcha, jadis autonome dans la gestion de ses affaires socio-politiques, devient une communauté indigène de l’ensemble des territoires coloniaux français.

En effet, le colon transforme le Fouo en « chef indigène », et ramène ses fonctions en auxiliaire de l’état colonial – et de la paix coloniale. Il joue le rôle d’auxiliaire de transmission entre l’administration colonial et la communauté Batcha. En d’autres termes, sa fonction principale est d’assurer l’interface entre le despotisme colonial et les populations Batcha.

De manière générale, avec la colonisation, les citoyens africains s’alignent à deux nouveaux registres institutionnels différents et complémentaires qui sont : le registre administratif moderne et le registre religieux. Ces nouveaux registrent s’ajoutent au registre traditionnel pour former un triple héritage qui constitue les éléments de la nouvelle société camerounaise. En effet, l’arrêté colonial de 1933 portant statut des chefs indigènes, définit le chef traditionnel Batcha comme un agent de l’état colonial.

Organisation dans la République du Cameroun
Au terme du décret n° 77/245 du 15 juillet 1977 un nouveau cadre légal réglemente les chefferies traditionnelles au Cameroun. Le gouvernement s’appuie sur l’arrêté colonial de 1933 pour assoir la nouvelle autorité nationale. La nouvelle loi se débarrasse par exemple du terme « indigène » et le remplace par « traditionnel ». C’est ainsi que les expressions de chefferie traditionnelle et de chef traditionnel sont nés dans un effort d’uniformiser la réalité des pouvoirs locaux du chef.

Selon le décret de 1977, les chefferies peuvent être du premier, deuxième ou troisième degré selon leur importance territoriale ou historique. L’administration camerounaise détermine les subdivisions administratives comme suit : Les chefferies supérieurs, les lamidats ou sultanats (chefferies de 1e degré dont 10 chez les Bamilékés qui sont : Bandjoun, Bamougoum, Babadjou, Bana, Foto, Banka, Bangang, Bangangté, Batcham et Bafou), les groupements ou cantons (chefferies du 2e degré), les villages ou quartiers (chefferies du 3e degré). Les chefferies sont aussi catégorisées en degré selon leur taille et leur hiérarchie historique. Une autre définition des différents degrés de chefferies traditionnelles est comme suit :

Premier degré : toute chefferie dont le territoire de compétence recouvre celui d’au moins deux chefferies de 2eme degré. Ses limites territoriales n’excèdent pas en principe celles d’un département;

Deuxième degré : toute chefferie dont le territoire de commandement englobe celui d’au moins deux chefferies de 3eme degré. Ses limite n’excèdent pas en principe celles des arrondissements ;

Troisième degré : correspond au village ou quartier en milieu rural, et au quartier en milieu urbain ;

Ces degrés représentent la hiérarchie des chefferies entre elles. La classification des chefs par degré stipule que tous les chefs relèvent sans médiation de l’autorité de l’état. A ce titre, leurs relations mutuelles sont marquées par le principe d’égalité.

Tout comme la quasi majorité des chefferies de l’Ouest du Cameroun, Batcha est présentement classé comme une chefferie de 2e degré, qui relève donc de l’administration territoriale de l’état camerounais. Avec le décret de 1977, le chef traditionnel Batcha demeure un auxiliaire de l’administration. En cas de vacance à la chefferie, le chef Batcha est choisi au sein de la famille dynastique royale appelée à exercer coutumièrement le commandement traditionnel, sur avis des « notables » de la chefferie. L’autorité administrative entérine ensuite sa nomination par arrêté du ministre en charge de l’administration territoriale.

En effet, selon la loi camerounaise, après le choix du chef traditionnel selon les critères coutumiers locaux, l’autorité administrative entérine ensuite sa nomination selon la nomenclature suivante : Les chefs du 1er degré par arrêté du Premier ministre, ceux du 2e degré par arrêté du ministre chargé de l’administration territoriale, et ceux du 3e degré par décision du préfet dans le ressort territorial auquel se trouve la chefferie concernée.

Selon la loi, le chef Batcha doit nécessairement résider sur son territoire de commandement, car les fonctions de chef traditionnel sont incompatibles avec toute autre fonction publique. Toutefois, l’autorité investie du pouvoir de désignation peut autoriser le cumul de fonctions, notamment lorsque la personne intéressée réside sur le territoire de la chefferie concernée.

Sous l’autorité du ministre de l’administration territoriale, le chef Batcha a pour rôle de seconder les autorités administratives dans sa mission d’encadrement de la population. En tant qu’auxiliaires de l’administration, le chef Batcha est notamment chargé d’une triple action :

  • de transmettre à la population les directives administratives, et d’en assurer l’exécution ;
  • de concourir, sous la direction des autorités administratives compétentes, au maintien de l’ordre public et au développement économique, social et culturel de son unité de commandement ;
    de recouvrir les impôts et taxes de l’Etat et des autres collectivités publiques, dans les conditions fixées par la réglementation;
  • Indépendamment des tâches qui précèdent, le chef Batcha doit accomplir toute autre mission qui peut lui être confiée par l’autorité administrative locale. Les chefs peuvent aussi procéder à des conciliations ou arbitrages entre ses administrés, conformément à la coutume et lorsque les lois et règlements n’en disposent pas autrement ;

Le chef Batcha doit porter un insigne distinctif, et éventuellement une tenue dont les caractéristiques sont déterminées par arrêté du Ministre de l’Administration Territoriale. L’acquisition de cet insigne et de cette tenue est à sa charge. Enfin, la loi prévoit que la fonction de chef traditionnel soit rémunérée selon des critères bien définis qui incluent entre autre la taille de la population de sa chefferie de commandement.

Batcha Online – Contribution : Guy LeBatcha

References:
La Chefferie Traditionnelle au Cameroun: ambiguïtés juridiques et dérives politiques

L’organisation des chefferies traditionnelles
Autorités Traditionnelles et Democratisation au Cameroun : Entre Centralité de l’état et logiques de terroir

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