Mbah Mouaffouo Tagniguè : « Les plus grandes difficultés restent l’incompréhension dans le dialogue, le langage vrai et l’hypocrisie. »

Le représentant de S.M. Joseph Kouekam auprès de la communauté Batcha de Yaoundé s’ouvre sur les problèmes les plus épineux de sa communauté dans un entretien spécial accordé à Batcha Online.

Les communautés Batcha sont généralement organisées en associations dans les differentes villes où ils vivent. Yaoundé est une de ces villes dans laquelle cette communauté est largement présente depuis plusieurs décennies. Afin de connaitre un peu plus sur cette communauté, Batcha Online a rencontré son leadeur, Mbah MouaffouoTagniguè Francis Ndanga. Par ailleurs notable Batcha, MbahTagniguè s’est ouvert à Batcha Online en lui offrant son analyse non seulement de l’organisation, des obstacles, des ambitions et des progrès de la communauté qu’il représente, mais aussi sur la situations politiques que confronte le village en ce moment.

Le représentant du Chef à Yaoundé s’est ouvert sur ses ambitions personnelles pour le village et nous a parlé des leadeurs Batcha qui ont été les plus grandes influences dans sa vie. Il a évoqué le problème de l’enclavement du foyer à Madagascar et la participation de sa communauté à son énorme contribution pour la construction du nouveau CES de Batcha. Finalement, MbahTagniguè a livré son souhait de voir les jeunes de l’AJEEBY prendre un rôle actif dans le recensement des Batcha de Yaoundé. L’intégralité de notre entretien ci-dessous.

« Cela relève de la compétence de S.M. de nommer son représentant et de le démettre. »

Batcha Online : Voulez-vous vous présenter pour les lecteurs de Batcha Online

Mbah Mouaffouo: Je m’appelle Ndanga Francis. Je suis le représentant de la grande famille Mbah MouaffouoTagniguè à Batcha. et représentant de S.M. Joseph Kouekam, Chef des Batcha, auprès de ladite communauté de Yaoundé. Je suis marié et père de 05 enfants.

Batcha Online : Vous êtes aujourd’hui à la tête de la destinée de la communauté Batcha de Yaoundé. dites-nous comment vous êtes arrivé là? depuis combien d’années êtes-vous le chef de cette communauté?

Mbah Mouaffouo: Je suis arrivé à la tête de la communauté Batcha de Yaoundé après le décès de l’ancien représentant MbeuTchuisseu Pierre (paix à son âme). Il y a environ 04ans.

Batcha Online : Qui avez-vous succédé à cette fonction ? Comment s’est passé la transition ?

Mbah Mouaffouo: J’ai succédé à feu MbeuTchuisseu Pierre dit Canari, et la transition s’est passée dans de très bonnes conditions au foyer de la communauté Batcha de Yaoundé en présence de S.M. Joseph Kouékam, chef des Batcha.

Batcha Online : Quelle est la durée du mandat du Chef Batcha de Yaoundé ?

Mbah Mouaffouo: Je dirai que cela relève de la compétence de S.M. de nommer son représentant et de le démettre

« Les plus grandes difficultés restent l’incompréhension dans le dialogue, le langage vrai et l’hypocrisie. »

Batcha Online : Comment était la situation de la communauté Batcha de Yaoundé quand vous avez pris les règnes de sa destinée, et comment l’évaluez-vous aujourd’hui ?

Mbah Mouaffouo: La communauté n’était pas dans un climat de sérénité. Ayant perdu son chef et le poste étant vacant, on s’est retrouvé dans un petit passage à vide. Aujourd’hui, elle a un vécu qui commence à se retrouver et beaucoup d’efforts sur plusieurs plans restent à faire. surtout dans le cadre de l’unité entre frères.

Batcha Online : Parlez-nous de votre vécu à la tête de cette communauté. Quelle est votre plus grande difficulté dans l’exercice de vos fonctions ?

Mbah Mouaffouo: Mon vécu est caractérisé par le respect que je donne à tous les Batcha, et du travail que nous mettons en place pour voir Yaoundé redevenir le centre pilote de la communauté Batcha du Cameroun, afin qu’à Yaoundé on se retrouve dans un cadre familial sincère où on peut développer des projets pour le développement de la jeunesse, pour le village, et redéfinir plusieurs actions socio-culturelles pour Batcha.

Les plus grandes difficultés restent l’incompréhension dans le dialogue, le langage vrai, et l’hypocrisie devant ses frères. Le fait de ne pas appartenir dans la logique de telle ou telle famille amplifie la division et l’ingérence négative dans les associations; des clans qui se forment pour contester des décisions prises en assemblée ne font pas avancer notre unité, nos assemblées et nos réunions. Nous devons apprendre à laisser aux différentes associations la gestion libre de leurs mandats dans leurs associations respectives. Par exemple, le chef de famille bien qu’étant le représentant de S.M., peut simplement s’informer, à la suite des travaux d’un comité qui opère librement, d’une décision qui a été prise pour résoudre un problème ponctuel, sans toutefois vouloir influencer les décisions de ce comité. De même, les notables conseillés auprès du représentant devraient pouvoir conduire des réfections sans intimidations ou autres mauvaises influences. Ces choses donneront le plein pouvoir aux différents présidents de gérer leurs associations.

Batcha Online : Comment les Batcha de Yaoundé sont-ils engagés dans le développement de leur village ? Quels sont les projets pour lesquels ils sont investi et comment sont-ils gérés ?

Mbah Mouaffouo: La communauté Batcha de Yaoundé a un problème de leadership . Les projets se réalisent ou pas dépendamment de qui les suggère. Si c’est un X qui communique le projet et qu’il y a un clan qui le conteste, ça ne pourra pas  aboutir même si le projet pouvait être entièrement profitable pour notre village. Mais par contre, nous avons noté que quand les instances supérieures du village font eux même la promotion d’un projet, les trafics d’influence n’ont aucun effet. Je prendrai à titre d’exemple la construction du nouveau C.E.S de Batcha pour lequel nous avons vu l’implication de S.M., du comité directeur de Yaoundé, et du comité de développement de Batcha. Voilà un exemple de projet ou l’information fut passée par des acteurs qu’il fallait et les résultats nous les avons eus. Yaoundé à elle seule a contribué à plus de 60 pour cent de la collecte sur le plan national et international.

Le foyer Batcha est « un sujet qui n’honore aucun Batcha y compris moi-même lorsque je me retrouve dans ce foyer. »

Batcha Online : Le foyer Batcha de Yaoundé est le plus enclavé des foyers Batcha du pays. Qu’est-ce qui explique cela? Sachant que Yaoundé regorge un nombre important des élites financiers Batcha, avez-vous pensé capitaliser sur cet atout pour offrir à cette grande communauté un foyer plus accessible et plus digne de cette communauté ?

Mbah Mouaffouo: Le foyer Batcha a un problème de servitude et d’empiétement dans son titre foncier par ses voisins. Ceci ne serait en aucun cas être une excuse vu l’état des lieux. Encore un des projets où la volonté de tous les Batcha de Yaoundé a manqué d’autonomie et continue de le faire pour une réalisation aussi prestigieuse. Voilà un sujet qui n’honore aucun Batcha y compris moi-même lorsque je me retrouve dans ce foyer. Je n’ai jamais pensé capitaliser dessus parce que ce sujet a été invoqué par mes prédécesseurs de toutes les manières possibles. C’est à peine si un jour la communauté pense quitter ou construire à Madagascar. A ma connaissance il n’y a pas de volonté forte. Néanmoins, il tient toujours grâce à l’amour que certains Batcha portent pour leur village et je pense qu’un jour ce  projet sera réalisable. Je tiens à dire à ceux de bonne volonté merci d’avance.

Batcha Online : Quelle est la population des Batcha de Yaoundé ? Avez-vous fait un recensement ? Si non, pensez-vous cela possible ?

Mbah Mouaffouo: Je ne vous donnerais pas un nombre exact car je n’ai jamais fait de recensement mais je trouve cela possible. Ayant la chance d’avoir à l’AJEEBY (Association des Jeunes Elèves et Etudiants Batcha de Yaoundé) un président merveilleux et des jeunes volontaires, nous pouvons bien initier ce projet en mettant à leur disposition des moyens qu’il faut pour le réaliser.

Batcha Online : Le samedi 14 janvier 2012 s’était tenue une grande réunion à Batcha présidée par Sa Majesté Joseph Kouekam. La réunion regroupait les notables et les chefs des communautés Batcha de plusieurs localités du Cameroun. Parmi les points à l’ordre du jour figurait l’auto-proclamation de Za’a Tcha comme nouveau Chef de Kwack, un des 16 quartiers de Batcha présentement sous l’autorité de Za’a Njué. Batcha Online était présent à Batcha ce jour et avait rapporté qu’aucune décision n’avait été prise. Nous savons qu’une autre réunion s’est tenue le 10 mars 2012 à huit-clos. Qu’en est-il du cas du chef de Kwack? Qui est chef à Kwack ?

Mbah Mouaffouo: Batcha étant un des quatre villages de l’arrondissement de Bana et Kwack étant un des 16 quartiers de Batcha, il ne saurait être question de division. Je ne sais pas si Sa Majesté a nommé un nouveau chef à  Kwack.

“J’ai découvert mon village Batcha grâce à Sop Souffouo Tchoquessi Edouard.”

Batcha Online : quels sont les hommes ou les femmes Batcha qui vous ont marqué ou continuent de vous marquer de par leurs œuvres?

Mbah Mouaffouo: Je dirai pour ceux qui sont décédés, Mekep Sop Njui Malandjou Kondjo Norbert, Djana Takeudo Daniel, Wemba Teh Nganso Jean Pierre, paix à leurs âmes. Ceux encore en vie, Sop Souffouo Tchoquessi Edouard dit Makombé. Grâce à lui j’ai découvert mon village Batcha. J’ai par la suite eu l’amour pour ce village, et j’étais fier d’y aller tous les weekends. Il m’a surtout motivé à me construire au village. Je remercie également le groupe Tchoquessi qui mettait gratuitement à notre disposition un car de 14 places pour le déplacement de toute l’élite voulant passer le weekend à Batcha. Sop Njui Jean Simé pour des œuvres personnelles en l’occurrence l’ouvrage d’un pont. Dr Wemba Leugueun, sans oublier Mekep Nana pour le courage dont il détient le secret pour son assistance à tous les Batcha.

Batcha Online : Pour nous amateur de la culture Batcha, pouvez-vous nous éduquer sur votre titre ? Que veut dire votre titre Mbah Mouaffouo Tagniguè ?

Mbah Mouaffouo: Mbah veut dire grand-père et Mouaffouo hommes fort et descendant de la chefferie. Il faudra retenir qu’ils sont comptés dans un village.

Batcha Online : Quelle activité professionnelle occupez-vous en dehors de vos fonctions de chef de famille Batcha de Yaoundé ?

Mbah Mouaffouo: Je suis commerçant.

Batcha Online : Pour finir, en tant que fils Batcha, quel est le domaine de développement social qui vous interpelle le plus à Batcha et comment comptez-vous contribuer à son amélioration?

Mbah Mouaffouo: J’ai des projets agricoles. Je pense créer une ONG.

Batcha Online : En tenant compte de la diaspora Batcha et ses partenaires qui vous liront sur notre site internet, dites-nous un petit mot pour la fin ; tout ce qui vous passe dans la tête et que nous n’avons pas pu aborder.

Mbah Mouaffouo: Je remercie grandement Batcha Online pour cet entretien. l’internet est un très grand outil de rassemblement, de la connaissance et de la recherche. Je dis également merci aux jeunes de la diaspora et même du pays qui ont pensés à créer le site de Batcha. Merci et que Dieu vous garde.

Batcha Online – Contribution : Géraldine Njonkou et Carlos Nkodjo.